L’ASSEMBLEE NATIONALE FRANCAISE S’INTERROGE SUR LES CONDITIONS DE L'ELARGISSEMENT FUTUR DE L'UNION EUROPEENNE
Extraits du Rapport d’information déposé par la Délégation de L'assemblée nationale pour l'Union Européenne le 7 juin 2006, PRÉSENTÉ par M. René ANDRE, Député.
Cet examen est surtout l'occasion d'engager la réflexion sur le renforcement des conditions de l'élargissement futur de l'Union européenne, avant le Conseil européen des 15 et 16 juin, à la lumière de la place centrale qu'a prise l'élargissement dans le débat sur l'avenir de l'Europe et des préoccupations de l'opinion publique.
LE RENFORCEMENT DE LA STRATEGIE APPLICABLE AUX NOUVEAUX CANDIDATS ET CANDIDATS POTENTIELS
L'Union européenne élargie offre désormais une perspective d'élargissement plus ou moins rapprochée à huit pays (et bientôt neuf depuis l'indépendance du Monténégro approuvée par référendum le 21 mai 2006) : la Bulgarie et la Roumanie avec lesquelles les négociations sont closes et le traité d'adhésion est en cours de ratification ; la Turquie et la Croatie avec lesquelles les négociations sont ouvertes ; enfin, les autres pays des Balkans occidentaux, soit candidat confirmé comme l'Ancienne république yougoslave de Macédoine (ARYM), soit candidats potentiels, comme l'Albanie, la Serbie-et-Monténégro, la Bosnie-et-Herzégovine.
L'achèvement du précédent cycle d'élargissement avec l'adhésion de la Bulgarie et de la Roumanie
Le 25 avril 2005, la Bulgarie et la Roumanie ont signé un traité d'adhésion fixant leur entrée dans l'Union européenne au 1er janvier 2007. Ce traité n'entrera en vigueur qu'après sa ratification, en cours, par les deux candidats et les vingt-cinq Etats membres actuels. Le traité d'adhésion renforce les sauvegardes par rapport à celles prévues pour les dix nouveaux membres. Il prévoit en effet une clause de report de l'adhésion d'une année, au 1er janvier 2008, en cas de préparation manifestement insuffisante dans un certain nombre de domaines importants. Le Conseil en décide à l'unanimité sur recommandation de la Commission ou, pour la Roumanie, à la majorité qualifiée dans les domaines de la justice et des affaires intérieures ou de la concurrence. Le traité contient également, comme pour les dix, trois clauses de sauvegarde (économique générale, de protection du marché intérieur, de suspension de la reconnaissance mutuelle des décisions de justice) autorisant la Commission à prendre des mesures jusqu'à trois ans après l'adhésion.
Le 16 mai dernier, la Commission a décidé de reporter à octobre sa recommandation finale aux Etats membres de retenir le 1e janvier 2007 comme date d'adhésion de la Bulgarie et de la Roumanie. Cette date ne pourra être maintenue que si, au cours des cinq prochains mois, les deux pays parviennent à corriger des déficits préoccupants.
La Bulgarie doit agir dans six domaines au lieu de seize en octobre 2005 et la Roumanie dans quatre au lieu de quatorze. Ils concernent la lutte contre le crime organisé, la corruption et le blanchiment d'argent, la gestion de l'agriculture et le contrôle financier des fonds structurels, la législation sur l'encéphalopathie spongiforme transmissible et, pour la Roumanie, l'interopérabilité de la collecte de la TVA et de la fiscalité directe avec celle de l'Union. La décision finale sera prise, en principe, au Conseil européen du 20 octobre 2006 à Lahti sous présidence finlandaise.
UNE MEILLEURE PRISE EN COMPTE DES INTERETS ET DES CAPACITES DE L'UNION EUROPEENNE
Les débats sur le traité constitutionnel dans les Etats membres, qu'ils se soient conclus positivement ou négativement, ont montré que les peuples européens demandent majoritairement une pause dans l'élargissement. Il faut les rassurer sur la maîtrise d'un processus qui leur paraît sans fin et sur l'avenir de l'Union européenne qui leur paraît flou.
La réforme préalable des mécanismes institutionnels
La réforme préalable des mécanismes institutionnels est une priorité. Les débats sur le traité constitutionnel ont en effet montré que les règles actuelles, de majorité qualifiée notamment, ne donnent pas une capacité suffisante pour décider et faire avancer dans une direction clairement définie un ensemble démocratique de plus de 450 millions d'habitants, et de 25 à 27 pays de plus en plus hétérogènes.
L'adhésion de la Bulgarie et de la Roumanie à l'Union européenne le 1er janvier 2007 déclenchera en principe un débat sur la composition de la Commission et, par extension, sur les règles de majorité qualifiée, car tout est lié.
Même si la Bulgarie et la Roumanie ont encore des progrès à faire dans la mise en œuvre de l'acquis communautaire, différer d'un an leur adhésion n'aurait aucun intérêt puisque le traité d'adhésion ne prescrit dans cette hypothèse rien de plus que des clauses de sauvegarde sectorielles en matière d'économie et de justice qui peuvent s'appliquer sans le déclenchement du délai d'un an.
En l'absence de solution pour le traité constitutionnel à la date du 1er janvier 2007, l'adhésion de ces deux pays entraînera la mise en œuvre du paragraphe 2 de l'article 4 du Protocole 1 sur l'élargissement du traité de Nice. Il prévoit que la première Commission postérieure à la date d'adhésion du vingt-septième Etat membre, c'est-à-dire la prochaine Commission en 2009, comprendra moins de Commissaires que d'Etats membres selon une rotation égalitaire dans le respect des équilibres géographique et démographique, dont le Conseil définira les modalités à l'unanimité.